Beau l’air de rien

Baudelaire est ainsi lui-même une sorte de figure symbolique de cet art, l’art de faire du Beau avec du rien, du Beau avec de l’air, du Beau l’air de rien, l’art de la poésie, car son œuvre et sa vie (reflet de son engagement dans son œuvre), sa posture consciente — et donc réfléchie, agréée par lui — d’artiste de la bohème, témoignent de la misère et la splendeur* que connaît tout créateur, artiste ou artisan, splendeur et misère qui sont d’ailleurs les deux pôles de la création entre lesquels son travail oscille balance toujours, est contenu, c’est l’échelle de mesure sur laquelle il fait monter graduellement son sentiment à l’un pour descendre à l’autre, comme le fait Gérard de Nerval sur la lyre d’Orphée, « modulant tour à tour les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée » (El Desdichado), et inversement, et à l’infini ; bref, c’est l’entrelacs de sentiments qu’il noue de complexité et qu’on appelle « tresse » sur la chevelure de la Muse, symbole de vénération et de beauté pure pour le poète. Continuer à lire …

London & Kerouac : jack à deux têtes d’une entreprise littéraire philosophique et spirituelle

Il y avait une connexion entre toutes choses, de l’étoile la plus lointaine dans les espaces infinis aux myriades d’atomes contenus dans le grain de sable sous son pied. Ce nouveau concept était un émerveillement pour Martin, qui passait désormais son temps à rechercher les passerelles reliant les objets visibles et les objets invisibles, même les plus incongrus, et se torturait l’esprit jusqu’à ce qu’il leur eût trouvé des affinités. […] Il unifiait ainsi l’univers et le contemplait, tantôt en bloc, tantôt en vrac, en se promenant dans ses allées, ses détours et ses jungles, non comme un voyageur sans but terrifié par l’épaisseur du mystère, mais comme un cartographe désireux de se familiariser avec tout ce qu’il y a à connaître. Et plus il en savait, plus il admirait le monde, la vie en général, la sienne en particulier. Continuer à lire …